En vers et contre tout

Publié le par abbé Gédéon

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Sac à fiel 
Balade double et cruelle d’une fille plus publique que la notoriété. 


Elle a le verbe qui suggère 
Avec onction et retenue 
Un bruit qui court en courant d’air, 
Air entendu, sous-entendu… 
Mais c’est l’écume de l’amer, 
Le dépôt de fiel ambigu : 
Elle a choisi un mot mystère, 
Et à bon entendeur, salut ! 

Elle a le verbe qui renifle 
D’un chien qui suit, d’un nez qui fuit, 
La voix qui soupçonne et qui siffle 
Ce qui se sait, ce qui s’ensuit… 
Elle a l’intuition qui persifle 
Et l’insinuation qui séduit. 
Elle a choisi le mot qui gifle 
Comme un gant qu’après l’on essuie. 

Elle a la verve et la manière 
D’enfermer chacun dans un mot ; 
Elle étiquette l’univers 
Et colle un nom sur chaque dos… 
Toujours, ce bagout, par derrière, 
Toujours ce mauvais goût de trop. 
Elle a choisi un mot en l’air 
Parce qu’il était bon, ou gros. 

Elle a verbe grave bas 
Qui fait slogan de tout secret : 
On sait ceci, on sent cela, 
On susurre ce que chacun sait… 
Comment, vous ne le saviez pas ? 
Si c’était faux, ça se saurait. 
Elle a choisi un mot bien gras 
Qui tache avec des « il paraît ». 

Elle a le verbe qui se gave 
De non-dits, de on-dit, de bruits, 
De bateaux qu’elle appelle épave, 
Et de ragots à demi cuits… 
Elle bombarde, l’air bon et brave, 
Ses bavardages sur autrui. 
Elle a choisi un mot qui bave 
D’envie, de scandale ou d’ennui. 

Elle a le verbe qui paraphe 
Et vous signe comme un auteur 
Qui s’est fait votre biographe… 
Mais elle attend aussi son heure 
Pour composer votre épitaphe 
Sans état d’âme et sans pudeur. 
Nous l’avons surnommée Sacaf
Mais son vrai nom, c’est la rumeur. 

(Envoi - ou refrain?) 

Car le mot est lâché 
Il va courir les rues 
Jusqu’au grand hallali… 
Le venin est tiré 
Il faut boire ciguë, 
Boire jusqu’à la lie. 

Publié dans Dites-le avec des vers

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